La proposition Sarkozy sur la mémoire de la Shoah fait débat
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PARIS (Reuters) - Dominique de Villepin et Jean-Luc Mélenchon se sont étonnés de l'idée de Nicolas Sarkozy de confier à chaque élève de CM2 la mémoire d'un enfant victime de la Shoah, estimant que l'on ne peut pas imposer la mémoire.

Mais Jean-François Copé, président du groupe UMP à l'Assemblée, et François Hollande, Premier secrétaire du Parti socialiste, ont salué la démarche du chef de l'Etat.

Lors du dîner du Crif, mercredi soir, Nicolas Sarkozy a annoncé avoir demandé au gouvernement de faire en sorte que, chaque année, à partir de la rentrée scolaire 2008, "tous les enfants de CM2 se voient confier la mémoire d'un des 11.000 enfants français victimes de la Shoah."

"Je ne crois pas que l'on puisse imposer la mémoire, que l'on puisse la décréter ou légiférer dans ce domaine", a réagi Dominique de Villepin sur Radio Classique.

Selon l'ancien Premier ministre, la charge de la mémoire d'un enfant mort est en outre "quelque chose de très lourd à porter."

"Vraiment ce président est incroyable", s'est exclamé Jean-Luc Mélenchon sur LCI "Un jour il est prédicateur (...) Maintenant le voilà transformé en instituteur. C'est lui qui décide ce qui est bon ou mauvais dans la manière de former les jeunes enfants", s'est insurgé le sénateur socialiste, ancien ministre délégué à l'Enseignement professionnel.

"Il n'y a personne qui a demandé une chose pareille: ni le Crif ni aucune synagogue", a-t-il poursuivi.

Si la proposition présidentielle est mise en oeuvre, "on n'en finira plus". Pourquoi vouloir "à tout prix infliger une cure de mémoire. Est-ce qu'on va faire pareil sur l'esclavage? La commune de Paris? Est-ce qu'on ne peut pas laisser la politique et la religion à l'écart de l'école", s'est-il interrogé.

DEVOIR DE MEMOIRE

Pour Jean-François Copé, en revanche, "cette démarche, qui invite les enfants de France à se sentir associés à l'indispensable devoir de mémoire, honore l'idée que nous nous faisons de notre République."

"L'antisémitisme et le racisme sous toutes leurs formes sont des fléaux que nous devons combattre avec virulence et, comme l'a dit Nicolas Sarkozy, cela se combat dès l'enfance", ajoute dans un communiqué le président du groupe UMP du Palais-Bourbon.

"Chaque fois qu'on peut faire transmettre les exigences du devoir de mémoire, il faut le faire", a également estimé François Hollande sur France info.

"Ce n'est pas une mauvaise idée", a également estimé Ségolène Royal en déplacement dans le Rhône. "Mais beaucoup d'écoles ont déjà mis en place cette action", a-t-elle fait valoir.

L'écrivain Marek Halter a salué une "initiative formidable".

"On en a parlé il y a un an. Je me suis toujours demandé comme cela se fait que les juifs si attachés à leur mémoire n'ont pas su la partager avec les autres, les non-juifs", a-t-il dit sur RTL.

"Pour un enfant à l'école, concevoir la mort de six millions d'individus c'est une abstraction", a-t-il ajouté en se réjouissant de l'idée de donner à chaque école ou groupe d'enfants "un visage d'un petit Moïse, d'un petit Isaac ou Jean-Jacques Rabinovitch."

"Il n'y a aucune garantie que ça marcherait mais c'est une idée forte et je pense que cela vaut la peine d'essayer", a-t-il dit.

Xavier Darcos, ministre de l'Education nationale, a à ce sujet chargé Hélène Waysbord-Loing, présidente de l'Association de la Maison d'Izieu, d'une mission "en vue d'élaborer les documents pédagogiques valorisant ce travail confié aux enseignants du primaire", indique le ministère dans un communiqué.

Gérard Bon et Emile Picy


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