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La guerre économique passe aussi par l'espionnage
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Alors que Renault connaît sa plus grave affaire d’espionnage, un journal norvégien, reprenant un télégramme diplomatique américain issu du fonds wikileaks, évoque la France non pas comme une des principales victimes, mais comme « L'empire du Mal » en matière d’espionnage industriel. Monnaies, quotas et autres barrières douanières, technologies: la guerre économique n'ignore pas l'espionnage.

« La France est l’empire du Mal pour ce qui est du vol de technologie et l’Allemagne le sait. » Encore une révélation estampillée Wikileaks.
Cette fois, c'est le quotidien norvégien Aftenposten qui a levé le lièvre. Repris très largement par une dépêche de l’AFP, et depuis par la presse nationale, la note diplomatique américaine fait même de cette activité une sorte de spécialité française à l’égal de la gastronomie. L’hexagone y excellerait, en effet, bien davantage que la Chine ou la Russie. « L’espionnage français est tellement important que la totalité des dégâts pour l’économie allemande est supérieure aux dégâts provoqués par la Chine ou la Russie », précise le télégramme citant Berry Smuty. Ce patron d’OHB Technologie, un « petit » constructeur de satellites persiste et signe puisqu'il est également l'auteur de la phrase faisant de la France « L'empire du Mal » .

C’est donc sur une appréciation d’un certain Berry Smuty, citée par un télégramme diplo tiré du fond Wikileaks, puis publiée dans un journal scandinave, pour finir par être largement étalée dans la presse hexagonale, qui sacre la France championne du monde du barbotage de secrets industriels…

Pourtant la France-Dark Vador n’a pas empêché OHB technology de rafler en 2010 un gros contrat au nez et à la barbe d’Astrium, filiale du géant franco-allemand EADS. C’est donc le petit OHB Technology qui sera chargé de construire une partie de la myriade de satellites destinés au programme de navigation Galileo, futur GPS européen.
« Telles que reprises par la dépêche AFP, les accusations sont gravissimes. Mais les propos de ce dénommé Berry Smuty sont plus nuancés dans le journal norvégien », tempère Olivier Hasside, délégué général du Club des directeurs de sécurité des entreprises (CDSE).

D’ailleurs, le télégramme rappelle opportunément l’intérêt des Américains pour une dissension franco-allemande. Y sont ainsi évoquées les tensions entre Astrium et OBH Technology, et à travers ces deux entreprises entre la France et l’Allemagne : « Initialement, le projet prévoyait qu'EADS-Astrium conçoive, construise et exploite HiROS en partenariat avec l'agence spatiale allemande DLR (…) Mais quand il est apparu à DLR et certains dirigeants allemands d'Astrium que la France, à travers son influence dans EADS-Astrium, essaierait de saborder le projet de peur qu’HiROS ne concurrence les activités satellitaires commerciales françaises (NDLR les fameux Spot), la décision a été prise de faire d'OBH Technology le principal contractant (de DLR). »

Et justement, pour ce projet de construction des satellites d'observation optique (HiROS), OBHT ne verrait pas d’un mauvais œil une collaboration avec des entreprises américaines. De là, à voir, dans ce télégramme, un appel du pied de la diplomatie US, il n’y a qu'un pas...
Cité par l’Expansion, Alain Juillet, ancien directeur du renseignement à la DGSE, est perplexe : « La France présentée comme championne de l’espionnage devant la Russie ou la Chine cela fait sourire. Pour autant il ne faut pas stigmatiser ces deux pays. L’espionnage industriel concerne la plupart des grands groupes industriels, peu importe leur nationalité. »

Une analyse que prolonge Olivier Hasside : « Je suis dubitatif sur la question de l’espionnage telle que développée récemment. Certes, les principaux acteurs internationaux de l’espionnage industriels se comptent parmi les principaux exportateurs : les Etats-Unis, le Japon et évidemment la Chine. Mais on regarde souvent très loin, quant à coté, c’est pas mal non plus. J’entends par la, que, ainsi qu’une note de la DGSE en faisait recemment état, l’espionnage industriel est plus souvent le fait de la concurrence intra nationale… De qui doit, avoir le plus peur ? De son concurrent à 10 000 kilomètres ou celui situé à 10 000 mètres ?»

Une question que doit sérieusement se poser Renault.

La régie va en effet regretter l’« espionnage industriel » version Auto-Plus : la publication des photos de son dernier modèle. La mise à pied pour espionnage de trois salariés placés au sommet de l’entreprise relève d’une autre ampleur. Sont concernés, selon l’Agence de presse Bloomberg, un des 30 membres du comité de direction, son adjoint et le directeur du programme du véhicule électrique. Confirmées, ces fuites fragiliseraient l’un des principaux projets industriels de la marque au losange. Le véhicule « zéro émission » est le relais de croissance sur lequel Renault-Nissan a déjà investi 4 milliards d’euros. L’affaire pourrait coûter un ou plusieurs des 150 brevets en cours d’achèvement. Reste à l’enquête à déterminer le bénéficiaire/commanditaire. Un sous-traitant ou un concurrent ? Un européen ou pas ?

La guerre économique est une réalité et l’industrie en est le principal théâtre.

Emmanuel Lévy


Source >  Marianne2



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